Vers un habitat adapté aux modes de vie et à l’environnement des Calédoniens
La DAPM* pilote un projet de caractérisation d’un habitat adapté aux modes de vie et à l’environnement naturel des habitants de Nouvelle-Calédonie, appelé « Habitat Océanien », en lien avec Fiji et le Vanuatu qui mènent de front le même projet. Les objectifs de ce travail sont multiples : proposer un référentiel pour un habitat approprié respectant les besoins et modes de vie des gens, développer des filières de matériaux biosourcés et anticiper l’impact du changement climatique sur les habitats.
Où et comment les gens-vivent-ils, avec qui ? Leur habitat est-il adapté à ce mode de vie ou au contraire, sont-ils empêchés dans leurs relations sociales ? Quelles sont les organisations spatiales de l’habitat qui pourraient correspondre à ces besoins sociaux ? Les matériaux et équipements des habitats sont-ils adaptés aux usages réels qui en sont faits ? Toutes ces questions doivent être posées directement aux habitants eux-mêmes afin de définir avec eux les caractéristiques d’un habitat adapté, dans lequel ils seraient épanouis. Un habitat inadapté aux modes de vie peut entrainer une détérioration prématurée des intérieurs et équipements mais aussi des pertes de repère, un mal-être, une destruction de l’identité qui peuvent aboutir à des problèmes de violences intra-familiales ou de délinquance juvénile.
Atelier à Ouvéa
Adaptation au changement climatique
La question du changement climatique est aussi abordée durant ces échanges. La densité des cyclones et la montée des eaux sont au cœur des préoccupations des gens, à l’instar de l’ile d’Ouvéa qui voit son littoral grignoté année après année par la mer. Il est essentiel de travailler au plus près des populations pour réfléchir avec eux à leurs vulnérabilités et aux moyens, des plus simples au plus sophistiqués, qui leurs seraient nécessaires pour améliorer leur résilience à ces changements.
Les enjeux sociaux et économiques de l’adaptation de l’habitat sont donc très importants.
C’est pourquoi, sous l’égide du membre du Gouvernement Vaimu’a Muliava, et avec le soutien du Fond Pacifique, un travail est en cours à ce sujet.
Ce travail, partagé entre la Nouvelle-Calédonie, Fidji et les Vanuatu, pose trois questions complémentaires :
- Quelle serait la morphologie d’un habitat approprié au mode d’habiter des différentes communautés ?
- Quel est l’état des connaissances en termes de risque climatique (vent, submersion, glissement de terrain…) et naturel (sismique, volcanique) ?
- Quel est le niveau d’appropriation par les communautés des impacts du changement climatique ?
Ateliers à Koné et Lifou
Des ateliers de concertation citoyenne
Une série d’ateliers de concertation citoyenne sur le sujet est ainsi en cours. Les trois premiers ont déjà eu lieu à Ouvéa, Lifou et Koné avec un petit groupe d’habitants issus de ces territoires. Les prochains ateliers vont concerner les habitants de Maré, ceux de la côte Ouest (de Boulouparis à Bourail), les communautés Wallisienne et Indonésienne. D’autres ateliers sont envisagés en milieu semi-urbain, en cours d’organisation.
D’une demi-journée, ces ateliers mettent en exergue le lien entre l’habitat et l’organisation sociale des gens. On va déterminer avec eux ce qu’ils aiment chez eux, ce qu’ils n’aiment pas, comment ils se sentent protégés et comment ils s’identifient à leur habitat, afin de déterminer les caractéristiques d’un habitat qui leur ressemble.
L’exercice majeur de ces ateliers consiste ensuite en un jeu créatif de groupe : Imaginer l’habitat idéal, en tenant compte du mode de vie des participants. C’est l’intelligence collective du groupe qui est à l’œuvre et chaque groupe va produire une organisation d’habitat « rêvée », avec des dénominateurs communs (les jardins, la nature, l’espace, la cuisine extérieure par exemple) et des caractéristiques propres à chaque groupe (différent positionnement de la case, du faré, aménagements variés…).
Comment trouver un habitat adapté en milieu urbain ?
Le grand défi de ce travail va être de trouver le moyen de transposer les exigences liées aux modes de vie océaniens (coutume, évènements communautaires ou claniques) dans un habitat urbain à semi-urbain. L’habitat idéal des groupes rencontrés repose sur un espace assez important, comprenant toujours un jardin, de la verdure et de la place pour disposer de façon aérée de nombreuses structures éclatées (« maison », case, faré, cuisine extérieure, bloc sanitaire…) répondant à des usages bien précis. Un travail en cours avec les habitants des Tours de Magenta, sous l’égide de la SIC, dans le cadre de la rénovation des tours, va permettre d’imaginer cette transposition : comment proposer un habitat adapté à un mode de vie océanien, plutôt tourné vers l’extérieur et impliquant des réunions familiales ou claniques importantes, dans un ensemble urbain dense constitué de tours fermées et de parkings ?
Des matériaux de construction adaptés
L’autre discussion importante en œuvre durant ces ateliers repose sur les matériaux de construction. Quelles sont les caractéristiques principales d’un matériau adapté, à la fois pour les habitants et pour les artisans constructeurs du territoire étudié ? Ces discussions permettent aussi de mettre en exergue des éventuels savoir-faire existants comme le travail du pandanus, qu’il conviendrait de transmettre et perpétuer, ainsi que d’envisager le développement de filières de matériaux biosourcés, comme les produits issus du cocotier sur les îles Loyauté (fibre, bois, palme) ou le bambou et le chanvre dans le Nord.
Enfin, une fois ce travail de collecte d’informations réalisé et analysé, un plan complet sera réalisé, incluant des projets de développement précis qui devront être lancés par différents acteurs. Caractérisation du référentiel d’un habitat adapté à destination des maitres d’ouvrage et architectes, développement de filières de matériaux biosourcés, adaptation des habitats au changement climatique, soutien à la transmission des savoir-faire, sont autant de pistes déjà identifiées qu’il va falloir étudier.
*Direction des Achats du Patrimoine et des Moyens du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.